Critique de Silver Surfer : Communion

Le Surfeur d’Argent est un personnage particulier dans l’univers Marvel, et sa carrière éditoriale a été assez chaotique. Apparu dans la série des Quatre Fantastiques en 1966 et créé par Jack Kirby et Stan Lee, il a rencontré un certain succès, lui permettant d’y être présent régulièrement puis d’avoir sa propre série. Cette dernière fut cependant abandonnée au numéro 18. Depuis, les apparitions du personnage restent assez irrégulières et sa série est plusieurs fois relancée. Je m’intéresse ici au début de la cinquième série régulière du Surfeur d’Argent, écrite par Dan Chariton et Stacy Weiss (maintenant Chariton aussi) et parue en 2003/2004. En France, l’histoire est actuellement difficilement trouvable, mais l’avis ci-dessous correspond au premier tome de sa publication en 100% Marvel par Panini, sorti en 2004, puis réédité en 2013. D’ailleurs, en 2009, l’éditeur avait proposé toute la série dans un Marvel Deluxe.

Ce volume, contrairement à ce que son titre peut laisser penser, n’a pas comme personnage principal le Surfeur d’Argent. Nous suivons Denise Waters, une habitante de la Nouvelle-Orléans et mère d’une jeune enfant, Ellie. L’histoire est lancée lorsque cette dernière se fait enlever par le Surfeur. Sa mère va alors tout faire pour comprendre ce qui s’est passé et tenter de retrouver sa fille. En parallèle, nous suivons quelques autres enlèvements d’enfants. Voilà le point de départ de la série qui reste relativement classique, et on se demande bien ce que manigance le Silver Surfer.

La lecture des premières pages donne plus l’impression d’être devant un épisode de X-Files que devant une histoire du Surfeur d’Argent : l’enlèvement étrange d’un enfant laisse le dessin d’une tête d’alien sur le sol et les gens alentours sont irradiés et ont le nez et les oreilles qui saignent. Cette scène fait d’ailleurs office d’introduction. Nous passons ensuite à Ellie Waters, qui se trouve être autiste, et qui dessine des dessins d’extra-terrestres. Et il s’agit vraiment de l’alien typique, celui de Roswell et de X-Files, le gris au gros yeux noirs. Nous avons un relent des années 90 lorsque les extra-terrestres étaient des stars comme le furent les zombies ensuite. Même si ça m’a rappelé de bons souvenirs, le récit aurait gagné à être un peu plus original.

La narration se fait par les pensées de Denise Waters, ce qui est intéressant, car le personnage n’a pas une vie facile. Elle ne possède rien, n’a pas d’argent, elle a juste sa fille. Son enlèvement va donc la retourner. On la prend pour folle. Un autre enfant, Gabe, va aussi se faire enlever mais, a contrario, son père est riche. Il va y avoir une collaboration pour retrouver les deux enfants mais à aucun moment elle n’est facile. Le risque d’avoir un raccourci scénaristique était présent, mais les auteurs n’ont pas fait ce choix. Chaque personnage a une personnalité qui lui est propre et aucun n’est un héros. Ce ne sont juste que des humains.

A l’origine, le Surfeur d’Argent était vraiment de son époque : les années 60-70. Ses aventures ont permis à Stan Lee d’élaborer des réflexions personnelles, métaphysiques ou philosophiques. Nous avons eu aussi des histoires totalement psychédéliques. Le gros défaut de Communion, à mon sens, est de n’amener aucune réflexion et de rester très terre-à-terre. Nous avons une bête adaptation de l’apocalypse avec le Surfeur d’Argent en ange. Pour ceux qui connaissent Prédictions, le film d’Alex Proyas avec Nicolas Cage, l’histoire est la même. Bref, certains diront que ce n’est qu’une propagande scientologue, je me contenterai de dire que ce côté du récit m’a gêné, et je n’ai pas retrouvé le Surfeur que j’ai pu apprécier.

De plus, le récit comporte quelques points assez étranges. Lorsque le Surfeur enlève un enfant, les personnes qui assistent à la scène sont irradiés. Pourquoi ? Et l’histoire semble totalement déconnectée de l’univers Marvel, puisque l’apocalypse arrive et le Surfeur ne songe absolument pas à contacter et rallier les héros de la planète.

Concernant les dessins : rien de transcendant. Sur les six numéros américains contenus dans l’album, le premier est dessiné par Milx et est clairement le moins bon. Le dessinateur a beaucoup de mal avec les proportions et le trait est loin d’être sûr. Cela s’améliore ensuite avec Lan Medina et David Yardin qui offrent un trait et une narration très corrects. Au niveau de la couleur, il s’agit d’Avalon Studios, créé par Whilce Portacio et Brian Haberlin : une valeur sûre mais avec un style particulier qui peut déplaire.

En conclusion, ce récit du Silver Surfer n’est probablement pas sa meilleure histoire. Même si la lecture est plaisante et les personnages intéressants, l’arrière-fond scientologue pourrait en gêner certains. Cependant, l’attitude relativement mystérieuse du Surfeur donne envie d’en savoir plus, et la conclusion pourrait changer totalement la vision que l’on peut avoir à la première lecture de cet album.

Cet article a été publié originalement sur MDCU : https://www.mdcu-comics.fr/news-0012484-marvel-cosmique-review-vf-silver-surfer-1-communion.html